Ce jour, l’Assemblée nationale discute d’une proposition de résolution tendant à modifier le Règlement de ladite Assemblée.
Au dire même de ses auteurs, ce texte ne constitue pas une révolution :
[ Exposé des motifs/ extraits ]
« Un relatif consensus s’est dégagé sur le bilan des réformes mises en œuvre précédemment et les dysfonctionnements persistants qui entravent l’action du Parlement.
Partant de ce constat, des propositions ambitieuses ont été faites aux membres du groupe de travail.
Malheureusement, le consensus n’est pas allé au-delà du diagnostic. Des divergences d’intérêt, et le point de blocage qui est apparu sur toute révision de la Constitution, ne permettaient pas de procéder dès à présent à des changements qui seront cependant indispensables pour donner leur plein effet aux évolutions en cours. »
Certes.
Mais, sans parler de révolution, on aurait pu – compte tenu de la fronde menée en 2008 et 2009 par les socialistes ( le président du groupe, Jean-Marc Ayrault en tête ), lors de la révision constitutionnelle – s’attendre à des mesures visant à élargir le droit d’expression des députés.
( Il faut se rappeler que ladite fronde portait principalement sur la limitation du temps de parole et du droit d’amendement des députés.)
Non seulement, il n’en est rien ;
mais les socialistes – sous la houlette du rapporteur, Jean-Jacques URVOAS – vont défendre une limitation du temps dit de « discussion générale » qui précède la discussion des amendements.
( L’exposé des motifs de la proposition de résolution indique sans ambiguïté que l’objectif de cette modification est de « favoriser des discussions générales plus brèves, leur durée souvent excessive retardant l’examen des articles et des amendements ».)
Le problème, c’est que la réforme du Règlement de 2009 a considérablement diminué le temps de débat sur les amendements !
M. Jean Mallot [PS] .[ C’est ] la formule du « tout à deux minutes » : deux minutes pour présenter et défendre un amendement, deux minutes pour intervenir en discussion générale sur un article, deux minutes pour expliquer son vote … ( Songez un peu : nous sommes en 1912, le président de séance se tourne vers sa gauche et annonce : « Vous avez la parole, monsieur Jaurès,… pour deux minutes » ! )
Il n’empêche, certains – dont le rapporteur – vont jusqu’à proposer qu’il y ait un seul orateur par groupe pour la discussion générale.
( On ne va tout de même pas donner la parole aux « frondeurs » … quitte, d’ailleurs, à leur reprocher de ne s’exprimer que devant les micros et les caméras – hors hémicycle !)
On a peine à reconnaître dans le rapporteur celui-là même qui, en 2009, affirmait :
« Vouloir brider le Parlement, vouloir, sous couvert de rationaliser le parlementarisme, limiter son action, ses capacités d’initiative, bref, sa liberté d’expression, ce sera toujours une erreur. »
Ou encore :
M. Jean-Jacques Urvoas. Ce sont deux conceptions du Parlement qui se font face.
L’une, la vôtre, voit dans le Parlement une simple chambre d’enregistrement.
Elle cherche donc a réduire au minimum le temps des parlementaires et de la discussion des amendements, programmant à l’avance le temps nécessaire au débat. C’est un recul pour le débat démocratique, c’est un risque pour la qualité de la loi.
L’autre conception, la nôtre, veut que le Parlement joue pleinement son rôle, que tous les députés, qu’ils soient de la majorité ou de l’opposition, puissent s’exprimer sans qu’il y ait de limitation. C’est une conception qui, finalement, croit à la confrontation des opinions, à la fécondité du débat contradictoire.
Si nous pouvons trouver légitime de vouloir, dans la production législative, éviter de perdre du temps, il nous parait à l’inverse inacceptable de chercher à en gagner. Or c’est ce que vous faites en foulant aux pieds les droits des parlementaires. »
Autre temps, autres mœurs … Que sont les socialistes devenus ?
Ce sont paroles que le vent emporte …
… et il ventait dans l’hémicycle …
… ce … les emporta !