2015/ Le « temps de la loi » … et le « temps du débat » : réponse au président de l’Assemblée nationale

Le 6 février 2015, C.BARTOLONE publiait sur son blog un article intitulé : « Le temps de la loi ».
Je propose ici une analyse critique de certaines de ses prises de position.
Mon initiative est à mettre en lien avec le travail du groupe sur le « devenir des institutions » mis en place par le président de l’Assemblée nationale et co-présidé par M.WINOCK.
J’assiste régulièrement aux travaux dudit groupe – je suis même souvent le « seul » public. Les débats sont très intéressants – on peut les suivre en vidéo
[ http://www2.assemblee-nationale.fr/14/commissions/avenir-des-institutions ] – , même si, à ce jour, on ne voit pas trop sur quoi ils vont déboucher.
( L’article auquel je fais référence donne cependant une petite idée du point auquel C.BARTOLONE souhaite arriver.)

page 2
« des lois bavardes qui perdent l’essentiel de vue. »
page 3
procédure accélérée et urgence.
page 4
vers « une réforme profonde de nos Institutions » ?

« des lois  bavardes qui perdent l’essentiel de vue. »

Vous dites : « Il n’est pas acceptable d’avoir des lois si bavardes […] qui perdent, parfois, l’essentiel de vue. ». [BARTOLONE ]
C’est là une question essentielle.
D’un côté, il y a les lois générales qui présentent peu de valeur normative ; de l’autre, il y a la multiplicité des mesures techniques – telles que les évacuateurs de fumée – qui relèveraient sans aucun doute du pouvoir réglementaire.
Mais, attention ! Si on resserre en même temps des deux côtés l’espace du débat, on peut se demander à quoi vont s’occuper les députés du non-cumul !
Je ne mets pas sur un même pied ces deux défauts et, sur ce point, je ne suis pas d’accord avec la récente modification du Règlement visant à restreindre le temps de la discussion générale.
En effet, pratiquement tous les sujets en débat s’articulent autour de deux principes qu’il faut concilier, articuler : sécurité et liberté, laïcité et reconnaissance de la différence, efficacité économique et protection sociale, etc.
Ce qui est en cause c’est la recherche de ce point d’« équité », de ce point d’«équilibre », de « ce point secret, mystérieux, sans doute insaisissable qui est la marque de chaque société » ( GORCE/ 2003 ). Le point – « ce point » – où, à un moment donné, pour une durée inconnue, aléatoire, la société « s’ajuste », trouve ses « marques ». C’est le temps du « juste ce qu’il faut ». Juste ce qu’il faut pour que la loi soit « juste » Non pas en vertu d’une justice transcendante qu’il faudrait découvrir, inscrire, traduire, réaliser dans le concret de nos vies. Mais au sens de « ce qui va » « juste ». Donc ce qui est « nécessaire ».
La définition de ce point que j’appelle « point DELTA » ( « DELTA » comme « D » … « D » comme « Démocratie » ) ne peut se faire sans débat, l’alternance et l’actualité modifiant sans cesse les données du problème.
( Sur ce point, je reprendrai à mon compte la phrase de J.M.Ayrault/ cru 2009 :
« La bonne loi a besoin de temps » )

A cela j’ajouterais la remarque suivante : le fait que les députés s’ingénient à trouver « la » mesure technique qui a des chances d’être adoptée ( et qui permettra de faire valoir leur présence dans l’hémicycle ) est sans aucun doute lié à la très faible marge de manœuvre que leur laisse l’exécutif.

Quand vous dites :
« Confondant urgence et précipitation, l’exécutif est souvent contraint de réintroduire pendant le débat parlementaire des amendements afin de modifier son propre projet de loi. »,
on peut se demander si cet accroissement des amendements proposés par le Gouvernement n’est pas la conséquence directe du choix qui a été fait en 2009 de prendre comme point de départ en séance publique le texte voté par la commission.