C’était un dimanche … en France, les élections ont toujours lieu un dimanche … c’était un dimanche de printemps … en France, les élections ont toujours lieu au printemps !
Après un petit déjeuner « croissants, baguette », après une grasse matinée – Dieu me pardonne ! – je me suis rendu à l’école du quartier où m’attendaient plusieurs piles de bulletins sur lesquels étaient inscrits le nom d’hommes et de femmes – plus d’hommes que de femmes d’ailleurs! – dont je n’ai jamais eu l’honneur de serrer la main.
Dans l’isolement et le silence de la cabine, j’ai recyclé ma voix – celle qui porte mes craintes et mes espoirs – dans l’un de ces bulletins que je déposai religieusement dans l’urne – transparente !
Dans cette urne, sont venus s’entasser d’autres bulletins, tout aussi porteurs de craintes et d’espoirs – mais pas forcément les mêmes craintes que les miennes, pas forcément les mêmes espoirs que les miens.
Et je revins à mes occupations qui, dimanche aidant, ne furent pas trop épuisantes. À 20 heures, assis devant ma télévision, j’ai ausculté attentivement camemberts, graphiques et commentaires cherchant à y déceler quelque reste de ma voix – recyclée.
Vers minuit, lors qu’apparut sur l’écran la composition définitive de l’Assemblée nouvelle, je compris que ma voix n’existait plus, qu’elle n’existerait plus avant cinq ans , lorsque, de nouveau, un dimanche …
Ma voix avait été non seulement recyclée, mais amalgamée, fusionnée, fondue avec des millions d’autres voix. Et, au terme de cette curieuse alchimie, ils étaient 577 à pouvoir – solidairement – dire nos craintes et nos espoirs.